La Bande Adhésive - DIVERS

Je l'ai tué
Il était là, endormi, en diagonale sur mon lit, le sourire aux lèvres. Il n’avait même pas pris la peine de se déshabiller. Sa cigarette fumait encore dans le cendrier. Je l’ai éteinte. J’étais assise sur le rebord en bois de mon futon, le plus près possible de son visage. Cela faisait deux mois que je n’étais pas revenue chez moi. Je le regardais fixement. Je pensais à cet air qu’il avait en venant me chercher à ma sortie de l’hôpital ce matin, à ce qu’il m ‘avait dit en conduisant la voiture. Mes bagages étaient posés à mes pieds, encore remplis de mes vêtements et de quelques boîtes de médicaments. Je me suis levée pour prendre un verre d’eau. J’ai avalé quelques gélules bleues et suis revenue à ma position initiale. Aucune autre pensée ne m’a traversé l’esprit : seul le dialogue prononcé dans la voiture tournait en boucle dans ma tête. Le soleil ne cessait de brillait par la fenêtre.Le double de mes clefs pendait encore à la ceinture de son pantalon. Il avait passé une nuit blanche. J’imaginais l’instant où, à six heures ce matin, il avait pénétré avec elle dans mon appartement. Cet instant où il n’avait pas voulu voir ce que je savais déjà. Les rayons du soleil ont commencé à s’amenuiser. Les mots qu’il avait prononcés résonnaient : elle avait de l’esprit ; il avait précisé une tête bien remplie ; ils avaient regardé le jour se lever, côte à côte, sans éprouver le besoin de se dire un mot. J’ai pris l’oreiller juste à côté. Je l’ai recouvert d’éther et de colle. J’ai voulu fixer ce sourire innocent pour qu’il le reste éternellement. Ce sourire insupportable.